L'isotopie dans sa considération statique n'est donc rien d'autre que la récurrence d'un même sème dans des sémèmes entretenant des relations syntagmatiques. Ceci exprime simplement le fait que les signifiants alignés dans un texte ont des sens <<proches>>, d'une proximité de caractère purement sémantique. Ainsi la simple phrase <<Mange ton gâteau avec ta fourchette !>> est le siège d'au moins une isotopie, puisque le sème /alimentation/ peut être repéré dans les descriptions de 'mange', 'gâteau' et 'fourchette'. Ainsi, cette simple notion de répétition permet d'ores et déjà de valider le sème récurrent comme description d'une <<thématique>> du discours. Cette description n'est bien entendu pas exhaustive, mais n'en est pas moins valide. Si l'on considère les différents sémèmes de cette phrase analysés indépendamment, la reconnaissance d'un sème commun établit une sorte de cohérence du discours, et de l'analyse qui en a été faite. L'isotopie constitue ainsi une sorte de <<condensation sémantique>> du texte analysé. Une isotopie est constatée dès lors que deux sémèmes d'un texte possèdent un sème en commun. De plus, le sème récurrent n'a pas besoin d'avoir le même statut pour toutes ses occurrences, que celui-ci soit générique, spécifique, inhérent ou afférent. Nous verrons d'ailleurs plus loin comment établir sur cette base une caractérisation des isotopies. Les sémèmes qui supportent une isotopie ne sont pas nécessairement aussi proches sur le plan syntaxique que dans notre petit exemple précédent : F. Rastier propose ainsi une isotopie du sème /intensité/ tout au long de L'assommoir ([24], p.115).
Au vu de toutes ces possibilités, il apparaît donc qu'une isotopie est chose fort courante si on la considère a posteriori, et qu'en tout cas elle ne fait que résumer le résultat de l'interprétation : c'est en effet en chasser tout aspect constructif.