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La lignée structuraliste, le problème de l'identité

À la base du structuralisme se trouve la recherche de points de comparaison entre langues, issue des grammaires comparées. Que ces langues soient séparées par l'espace, le temps ou les deux, la méthode consiste en la recherche de stabilités entre figures d'expressions et idées véhiculées (par exemple le proto-morphème pe- dans les diverses expressions de <<pied>> et de ses dérivés dans les langues indo-européennes).

La grande idée de Saussure [28] fut donc de considérer dans ce cas la nature de l'élément de base de la comparaison. Reconnaissant la langue comme système, il exprime que c'est la présomption de connaissance de ce dernier qui permet d'aboutir à l'identification de ses constituants (et donc de commencer véritablement la description).

Même si l'on isole le signe dans un schéma de relations entre ses parties (signifié et signifiant), il faut toujours considérer que l'élément est indissociable du tout systémique auquel il appartient et qu'il constitue. L'importance n'est donc pas seulement portée sur la nature et la signification des relations entre les parties du signe, mais surtout sur les relations entre les signes.

Un autre exemple de cette difficulté réside dans la notion même de paradigme. Toujours dans le cadre des comparaisons entre langues, on doit identifier des classes de comparaison pour les termes. Par exemple, pour identifier le <<sens>> du préfixe dé-, il faut considérer un ensemble de termes comme défaire, démonter, démolir, etc. Bien des classes de comparaison sont pourtant disponibles pour chacun de ces termes, comme faire, refaire, défaire, mais c'est avant tout la présomption de l'objet à mettre en évidence, et du rôle qu'il joue dans le système de la langue qui détermine les effets locaux utilisés pour mettre en évidence sa nature et même son existence.

Quand nous énonçons le terme de présomption, il faut en fait avouer que l'on s'intéresse à l'identité de l'élément. Plus qu'une évidence, cette identité doit en fait être construite. Les relations paradigmatiques qu'entretient une unité signifiante se basent sur son identité, mais en fait elles la forment par là-même. Un mot (comme signification), par exemple, va pouvoir être classé dans diverses classes sémantiques (et supporter des relations au sein de celles-ci) parce qu'il a été identifié, mais cependant ce sont les classes admises et les classes injustifiées (plus qu'impossibles, puisque l'on peut toujours s'amuser à regrouper un ensemble aléatoire de termes et les unifier par un contexte ou même un texte) qui vont construire ou peut-être simplement traduire cette identité. À un autre niveau, si l'on décompose cette entité à classer, c'est sur la base du partage d'un de ses composants avec d'autres entités que son appartenance à une classe sera justifiée. Le morphème `faire' dans l'exemple précédent est <<le même>> dans tous les verbes énoncés, alors que d'autres composants y entretiennent des relations de différence (`re' et `dé' par exemple). Ainsi, dans une approche formelle, un point de départ est nécessaire dans la description d'une unité sémantique (un signifié). Celle-ci peut n'être que partielle, comme l'identification d'une classe qui contient cette unité. À partir d'une spécification minimale, l'ensemble de la notion peut ainsi se construire, cette construction faisant partie d'un processus interprétatif. Ainsi, la fameuse notion de généricité - spécificité n'est donc qu'une conséquence de ces deux principes fondamentaux (identité et différence). L'organisation paradigmatique repose sur la notion de substitution, et suppose donc une identité de l'unité transposée à travers les contextes.

Cet apparent paradoxe n'a, en fait, pas tant d'hermétisme, si l'on considère la double identité du <<mot>>. La première est une identité de forme (une simple chaîne de caractères), la seconde une identité de contenu, du moins pour ce qui est des classes et des relations sémantiques.




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Ludovic TANGUY
Fri Dec 5 17:04:33 MET 1997